Moubarak n'est pas Ben Ali

Publié le par Martin

Je disais dans un précédent article que je ne pensais pas qu'un scénario tunisien pouvait se réaliser dans d'autres pays arabes, chaque cas étant très différent.

Les derniers évènements, égyptiens notamment, ne me donnent que partiellement raison.

 

Omar-Souleiman.jpgCar en effet les manifestations et la pression de la rue au Caire et à Alexandrie ont conduit à des changements importants : libération de prisonniers, changement du gouvernement, promesse de ne pas se représenter aux prochaines élections de Moubarak, etc.

Le nouvel homme fort est Omar Souleiman, nouveau vice-président, ancien patron des services secrets égyptiens. Il est soutenu par les Etats-Unis pour assurer la transition jusqu'aux prochaines élections. Cet homme est le plus fidèle allié de Moubarak, et est responsable de la politique de répression et de torture menée en Egypte depuis des décennies. Le scénario aujourd'hui proposé par le pouvoir égyptien, avec le soutien discret mais très fort de l'Occident, est de maintenir l'armée au pouvoir pour garantir la paix avec Israël et les accords commerciaux et politiques avec l'Occident.

 

Freres-muslmans.jpgPourtant, la démocratie implique de laisser le peuple décider de ses dirigeants. A la différence de la Tunisie, mais comme en Irak ou à Gaza, les oppositions libérales discréditées par leur alliance de fait avec les dictateurs et leur soumission aux Occidentaux ne peuvent pas constituer une alternative crédible. Ce sont des partis religieux ou ethniques qui incarnent actuellement le mieux les aspirations des peuples arabes : les chiites ont donc remporté les élections en Irak, les islamistes à Gaza et les Frères Musulmans le feront en Egypte.

 

Je ne comprends pas la volonté des Occidentaux de lutter contre cette tendance. C'est inéluctable, qu'il y est ou non démocratie. Car les islamistes représentent la seule réponse idéologique et pragmatique aux difficultés politiques et économiques des pays arabes. Ces difficultés ont été niées par les pouvoirs en place et par l'Occident pendant trop longtemps pour que leurs représentants conservent une quelqconque crédibilité.

L'exercice du pouvoir contraindra d'ailleurs les Frères Musulmans à faire des compromis, à accepter l'influence occidentale pour ses avantages et ses inconvénients, et certainement à améliorer la situation sociale des gens au quotidien, beaucoup plus qu'un pouvoir par l'armée.

 

C'est en regardant la mise en pratique de leur programme que les Egyptiens constateront qu'une partie, les idées politiques et religieuses, constituent des reculs, et que d'autres, les avancées sociales et la redistribution des richesses, sont positives. (Les plus et les moins restent à prouver bien sûr, mais c'est simplement pour rappeler que tout n'est pas noir ou blanc dans un programme qui se veut "radical" comme celui des Frères Musulmans).

 

L'idée de contre-pouvoir entre l'armée et les Frères me paraît donc intéressante, pour garantir une transition entre la volonté du peuple et la réalité géopolitique egyptienne.

Publié dans Monde

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M
<br /> <br /> En complément, je renvoie vers l'interview d'Hubert Védrine dans Les Echos<br /> d'aujourd'hui, où "En fin de compte, on sera tout à fait sûr que la démocratisation est enclenchée lorsque les islamistes, quelque part, auront quitté le pouvoir après avoir perdu des élections".<br /> <br /> <br /> Alors oui, il faut aller au bout de la logique démocratique, les inconvénients ou menaces de court terme étant peu de choses sur les avantages et améliorations de long terme.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
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